Airs d'opéras comiques
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"Du point de vue spectacle, l'opéra-comique français est, dans l'ensemble, une réussite, et la musique y joue un rôle souvent fort plaisant. Tout cela est vif, alerte, spirituel, habile, parfois pétillant - cela chante dans toutes les mémoires, et il n'est nul besoin de connaître le rudiment du solfège pour s'en délecter. La musique, presque uniquement mélodique, encore qu'elle soit soutenue par un orchestre à la fois léger, transparent et qui, jamais, n'accapare indiscrètement l'attention, suit l'action avec souplesse, avec esprit, avec bonne humeur."*
C'est dans les Airs sérieux et à boire, la Comédie Italienne et dans les théâtres de foires que l'Opéra-Comique confirme sa naissance, se développe et finit par s'imposer notamment grâce, à la fin du XVIIe siècle, aux foires St-Laurent et St-Germain (qui se déroulent du 3 février au dimanche de la Passion).
A la fin de l'année 1714, l'Opéra autorise le nom définitif de l'Opéra-Comique composé alors du Vaudeville (à l'origine Vau de Vire) mêlé d'ariettes.
C'est donc l'alternance du parlé et du chanté qui fait la spécificité de l'Opéra-Comique contrairement à l'Opéra qui est chanté de bout en bout.
Il faut donc aux interprètes un solide travail d'acteur allié à des qualités vocales de plus en plus exigeantes. Le XIXe siècle produira un nombre considérable de partitions jouées des centaines de fois parmi lesquelles se distinguent notamment : La Dame Blanche (1825) de Boieldieu, Les Dragons de Villars (1856) de Maillard, Le Pré aux Clercs (1832) d'Hérold, Les Noces de Jeannette (1853) de Massé, Lalla Roukh (1862) de David ou Le Postillon de Longjumeau (1836) d'Adam.
Dans notre série de recueils, nous ne manquerons évidemment pas de proposer des oeuvres antérieures et postérieures à ces dates, oeuvres particulièrement choisies pour leurs différences (au niveau des tessitures, de l'agilité, du legato, etc.). Il nous est apparu évident, lorsque c'était le cas, de laisser les textes parlés avant, pendant et après les airs, ce qui caractérise l'essence même de l'Opéra-Comique.
Le but de nos recueils est avant tout de développer un répertoire incontournable de l'histoire de la musique française et de donner la possibilité aux interprètes d'épanouir au mieux leurs qualités vocales et théâtrales.
Dr. Michel Verschaeve
* Robert Bernard, Histoire de la Musique, tome II, éditions Nathan, Paris, 1961, p. 621.
ADAM Adolphe : Le Postillon de Longjumeau (Air d'Alcindor) - BERNICAT Firmin : François les bas bleus (Air de François) - DAVID Félicien : Lalla-Roukh (Couplets de Baskir) - GOUNOD Charles : Le Médecin malgré lui (Couplets de Sganarelle) - GRETRY André-Ernest-Modeste : Richard Coeur-de-Lion (Air de Blondel) - LECOCQ Charles : Ali-Baba (Romance d'Ali-Baba) - MAILLARD Aimé : Les Dragons de Villars (Chanson à boire) - MESSAGER André : La Basoche (Couplets de Clément) - MEYERBEER Giacomo : Le Pardon de Ploërmel (Scène et romance d'Hoël) - PAËR Ferdinand : Le Maître de Chapelle (Air de Barnabé) - PLANQUETTE Robert : Surcouf (Entrée de Surcouf) - RABAUD Henri : Mârouf, savetier du Caire (Air de Mârouf)
Les éditions Henry Lemoine viennent de publier trois nouveaux recueils d'airs et de duos d'opéras-comiques sélectionnés par Michel Verschaeve (Airs d'opéras-comiques pour baryton, Airs d'opéras-comiques pour soprano, vol.B, Airs d'opéras-comiques pour soprano-ténor).
Ces recueils illustrent de façon bien opportune les réflexions de Didier Roumilhac dans sa série d'articles Questions d'esthétique des derniers numéros d'Opérette. On y trouve un panorama éclectique du répertoire intermédiaire, depuis les opéras-comiques d'Ancien-Régime (Grétry ou Monsigny), jusqu'aux inclassables du XXe siècle tels que Mârouf, savetier du Caire d'Henry Rabaud. A côté des incontournables déjà présents dans les précédents recueils de la série : Boieldieu (La dame blanche), Adam (Le postillon de Longjumeau), Auber (Le domino noir), Massé (Les noces de Jeannette), Maillard (Les dragons de Villars), on retrouve avec plaisir des compositeurs plus proches du répertoire d'opérette avec des titres sortant souvent de la routine : Lecocq (La Marjolaine), Bernicat (François les bas bleus), Planquette (Surcouf), Godard (La vivandière), Messager (La fauvette du temple, La Basoche).
D'une présentation soignée et agréable à l'oeil, ces recueils présentent l'avantage d'offrir, notamment aux apprentis chanteurs, non seulement l'occasion d'aborder des styles et des esthétiques très différents mais aussi d'expérimenter des emplois très divers car la dimension théâtrale est toujours très présente dans ces pages choisies. Cela est frappant en particulier dans les duos où les interprètes sont conduits inévitablement non seulement à chanter mais aussi à se donner dramatiquement la réplique. Puisse cet exercice les inciter à cultiver la dimension essentielle dans ce répertoire et trop souvent souverainement oubliée : l'articulation.
Gérard Loubinoux
Revue Opérette n°165, novembre 2012