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un extrait
Renaud Capuçon (violon)
Wiener Symphoniker
Orchestre de l'Opéra National de Paris
Philippe Jordan (direction)
Orchestre Philharmonique de Radio France
Myung-Whun Chung (direction)
Auprès de mes amis Wolfgang Rihm, Pascal Dusapin et Bruno Mantovani, trois compositeurs majeurs de notre temps, j'ai appris à respirer leur musique. En travaillant avec eux, j'ai découvert leurs univers sonores et Ieurs singulières personnalités. Je Ies remercie pour ces oeuvres magnifiques dont je suis fier d'être le dédicataire. Je vous invite à Ies découvrir et à les aimer, comme j'ai aimé Ies apprendre et leur donner vie.
Renaud Capuçon
RHIM Wolfgang : Gedicht des Malers - DUSAPIN Pascal : Aufgang - MANTOVANI Bruno : Jeux d'eau
Renaud Capuçon : Tout commence par l'admiration. Adolescent, je voyais Anne-Sophie Mutter et Gidon Kremer explorer, chercher, passer commande. Ils pouvaient aussi bien rester en compagnie de Beethoven et de Tchaïkovski, personne ne leur en aurait fait reproche. Mais ils voulaient échanger, converser avec les compositeurs vivants.
Et je me disais : nous avons besoin de cette vie. Après la sonate que m'a dédiée Nicolas Bacri il y a vingt ans, j'ai donc voulu suivre le même chemin. Il y a sept ou huit ans, j'ai demandé à Pierre Boulez s'il voyait des musiciens susceptibles d'écrire un concerto pour violon. Il a évoqué Pascal Dusapin et Bruno Mantovani, que j'ai vus, et voilà, le disque raconte la suite. Ce sont des œuvres très différentes, dont la création a été soutenue par Pierre Bergé, alors que la commande à Wolfgang Rihm vient du Festival de Pâques que j'organise à Aix-en-Provence. Des oeuvres qui auraient pu ne jamais se croiser, mais qui allaient si bien ensemble dans leur opposition ! Avec deux excellentes bandes réalisées par Radio-France et un enregistrement de notre cru au Konzerthaus de Vienne, nous avons formé ce tout à trois voix, trois orchestres et deux chefs.
Au départ, c'était un pari. Maintenant, c'est notre quotidien. Aufgang, de Dusapin. j'ai dû le jouer vingt-cinq fois. D'autres le jouent aussi. Dites musique centemporaine, tout le monde s'enfuit. Jouez Mantovani ou Dusapin, tout le monde revient. C'est la musique d'aujourd'hui, notre musique a nous.
Je ne la défends pas, je me contente de l'apprendre et de l'interpréter. Sans aucune barrière esthétique. Guillaume Connesson termine un concerto que nous donnerons l'année prochaine avec Stéphane Denève. Ensuite Hosokawa, Attahir, beaucoup d'autres. Au moins un concerto et une oeuvre de chambre par an. Excellent pour la santé. Car le travail avec les compositeurs vivants modi?e l'approche que nous avons du répertoire. Et ce qu'il nous apprend, c'est le contraire de l'obéissance, de la soumission. Ce que ce travail nous apporte d'essentiel, c'est la liberté. Mozart et Brahms en profitent autant que nous. Au début, c'était un désir - à présent oui, c'est un besoin.
I.A.A.
Diapason n°663 (Déc. 2017)