Composer est parfois une activité extrêmement concrète. Gratter la mine d'un crayon en des endroits précis, gommer, tracer - puis tailler un crayon, regarder le dessin de sa pensée autant qu'écouter. Comme certainement beaucoup de compositeurs, le choix du papier, son accroche, sa texture, sa couleur, l'espacement des lignes participent du plaisir qu'on aura ensuite à y déposer, jour après jour, des traits, des courbes, des points. Et que dire du choix du crayon, de la gomme. Quotidiennement, on dépose sur le papier de la gomme et du graphite - de petits amas autour de ce qui restera "gravé" sur cette surface.
Sous ces amas, le papier a ses limites, son propre espace - qu'il faudra bien se résigner à tourner pour abîmer une nouvelle page blanche.
Et si ces amas, cet espace formaient la structure d'une pensée poétique sans cesse confrontée à cette fragilité de l'artisanat ? Sans possibilité d'aller au bout de mes pensées, au moins vais-je, chaque jour, au bout de ma page en y posant ce qui restera tout autant que ce qui s'envolera au moindre souffle.
Cette pièce, ne tenant qu'à une respiration trop appuyée, est dédiée à la voix délicate de Virpi Räisänen.

Colin Roche