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un extrait
10/07/2014 - Aix en Provence, Conservatoire Darius Milhaud, Master-class - Quatuor Béla
Les fantômes dont je parle ne sont pas ceux dont parle le philosophe, mais des fantômes bien plus communs pour un musicien, et qui viennent de la musique même, de son histoire, probablement de mélodies, d'accords qui ne cessent d'habiter sa mémoire : fantômes de Ravel ou de Debussy, fantômes de la nuit d'Henri Dutilleux.
Ils sont tout autant une matière où trouver une origine, un écho anticipé, et tout à la fois un aveu d'impuissance. Puis-je m'y soustraire ? Puis-je les oublier dans l'instant de l'écriture ? L'acte de création artistique serait alors conjointement l'acte de convier et celui de repousser des fantômes. Il ne serait pas autre chose que cette "hantologie" de la mémoire musicale.
Parler longuement de fantômes s'attache à des apparitions et à la nature même de ces apparitions, depuis celles quasi textuelles - citations ou intertextes - jusque celles, invisibles et indéchiffrables, où la matière musicale prend son origine (mélodies, échelles, accords) - manière de dire que ce qui importe, ce ne sont pas seulement les fantômes, mais les modalités de leurs apparitions et de leurs évanouissements : ainsi ce long contrepoint central construit comme une chambre secrète à partir de fragments mélodiques empruntés à l'histoire et déformés, ainsi cette coda inattendue, où le phénomène "hantologique" se dévoile, où surgissent nommément chacun de ces fantômes et pour une seule fois reconnaissables.
Jérôme Combier
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