Butterfly le nom

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Texte de Marc Jaffeux


Pourquoi Cio-Cio-San quitterait-elle l'ombre du paravent qui la protège, pourquoi répondrait-elle aux demandes de sa mère ou de Suzuki ? Ce ne sera pas pour être maquillée, ni pour revêtir sa robe de mariée : mais pour épouser cet homme, l'Etranger, venu d'un pays où les traditions n'importent pas. Aussitôt il l'emportera au loin. Et, du haut du ciel, tombe une colonne de lumière sur Nagasaki qui éteint un à un les lampions du mariage, libérant Cio-Cio-San de leur prison de couleurs. Puis l'Etranger part. Butterfly, ainsi l'appelle-t-on dorénavant, trouve refuge au sommet d'une montagne d'où elle surveillera la baie. Qui, alors, est Butterfly ? Cette femme habillée de blanc éperdue dans le blanc d'une tempête de fleurs de cerisiers ? Cette enfant noyée dans la foule de ses sosies ? Ou, lorsque tombe la nuit, cette voix qui se défait jusqu'au Rien ? Jamais l'Etranger ne reviendra. Et, incapable de porter un nom afin de porter un désir, dénudée par sa douleur, Butterfly s'abîme. Peut-être existe-t-il néanmoins un lieu, que cela soit au bord d'un lac ou à l'intérieur de sa manche, où échapper à l'appel de son nom ? Incarnée, Butterfly meurt. Racontée, elle pourrait se souvenir ou rêver.
Le 19 octobre 1994 était volé à la Villa Puccini le paravent de laque de Madame Butterfly.

Marc Jaffeux


1. Prologue 1
Monologue de Butterfly dissimulée par le paravent
Prologue 2

2. Scène I - le maquillage (avec Suzuki)

3. Interlude I - la mer - la baie de Nagazaki

4. Chanson de Butterfly (haiku)

5. Scène II - préparatifs du mariage (avec la mère)

6. Interlude II - le mariage

7. Premier choeur des bonzes

8. Scène III - duo de Butterfly et de l'Etranger

9. Interlude III - sur la montagne

10. Scène IV - récit de Suzuki
retour de l'interlude III

11. Scène V - l'arrivée d'un bateau

12. Scène VI
et Interlude IV - la tempête et les fleurs

13. Scène VII - la folie de Butterfly (avec le fonctionnaire)

14. Deuxième choeur des bonzes sur un bateau

15. Finale - les six dernières paroles de la nuit (avec les oiseaux, le fonctionnaire, les trois bonzes, les huits porteurs de lampions puis l'Etranger)


L'espace où se joue de manière presque immobile la douleur de Butterfly est un point minuscule dans une immensité. De la maison "à soufflets" dominant la baie, on guette en surplomb le grand panorama de l'espoir puis de la désillusion.
L'orchestre de cette Butterfly veut être ceci : l'espace immense à surveiller - murmure, bruit presque indiscernable de la mer, du bateau qui ne vient jamais (et s'il vient ce n'est pas le bon), mais aussi cliquetis à peine audibles de la maison désertée qui n'est plus qu'un jouet (Cio-Cio-San est presque une enfant) où l'on mime dans un rite d'attente l'amour conjugal resoudé si la mer voulait bien rétrécir. Voilà la musique qui hante Cio-Cio-San, une musique étrécie dont tous les instruments tiendraient dans sa manche. Et l'orchestre n'est plus qu'un luth en forme de lune soumis, comme le (les) personnage(s) au fameux "vide de parole", le satori.
Lorsque, dans le fameux air de Puccini en sol bémol, Butterfly dit "qu'un beau jour on verra un filet de fumée" venir de la mer annonçant le retour du bateau et de l'amour, prophétise-t-elle cette autre colonne de fumée venue aussi d'Amérique s'abattre, un jour d'août, sur Nagasaki, la ville où la délaissée attendait un signe.
Elle sait que tout est à voir dans l'invisible, elle sait écouter ce que les coeurs tranquilles ne savent plus entendre.
Dans cet opéra non représenté, Butterfly joue, sans masque, tous les rôles. Elle les connait si bien. Un choeur d'hommes lui répond parfois au loin.
Butterfly est une invention d'occident, c'est le coloriage exotique d'une douleur, l'expiation d'un ailleurs impossible à vivre, comme l'écriture est cela à tout moment. Un chromo-vérité.

Gérard Pesson


"Je n'oublierai jamais le choc que je ressentis en me rendant compte pour la première fois de ce passage où Butterfly chante le navire blanc qui doit lui rapporter son officier de marine. Nous pensions être les capitaines de tels navires de guerre quand nous étions enfants (...), nous avions acheté leurs modèles dans la papeterie à côté du lycée, et comme c'étaient les premiers de tous les navires de guerre, nous n'étions pas étonnés du tout de les retrouver dans des chansons - depuis toujours la musique a recueilli les modèles historiques des objets, et même de l'espace qui nous entoure, comme des projections. S'y mêle simplement un peu de honte quand ces archétypes que nous avons cru personnels, sortent d'un coup de notre enfance et deviennent ceux de toute une époque. C'est seulement le montage photographique du port de Nagasaki par Moholi-Nagy, avec les petits bateaux mobiles au fond et les lumières réelles, qui a réalisé scéniquement cette couche du Vérisme. Mais c'est celle de sa vérité".

Adorno, Aphorismes musicaux (1927-1937)

2(1flA).2(1ca).2(1clB).2(1Cbn) / 2.2.2(trbT+trbB).0 / 3perc / hp / pno / 6.6.4.4.2 / 6T3Bar3B


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Détails

Référence
27515R
ISBN/ISMN
Instruments
Soprano, choeur d'hommes et petit orchestre
Editions
Lemoine
Support
Matériel
Genre
Contemporain
ISWC
T-003.103.225.3
Durée
37'
Date de sortie
01/01/1998

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